Le métier des acteurs de l’environnement de travail a été profondément transformé avec le Covid et le développement du travail hybride. Le collaborateur est désormais au cœur des décisions, faisant émerger de nouvelles fonctions, comme celles liées à l’Hospitality Management.
Nathalie Cara, responsable de l’environnement de travail chez Manutan depuis plus de dix ans, a été visionnaire sur le sujet. Elle avait saisi l’importance de l’humain bien avant la crise, et avait déjà étendu ses missions au-delà de la simple gestion des murs : organisation des événements internes, création d’une équipe dédiée au service des collaborateurs…
Retour sur une direction de l’environnement de travail avant-gardiste, qui a fait le choix du flex office pour améliorer l’expérience collaborateur, alors même qu’elle n’avait aucun enjeu de réduction des espaces !
Composée de 23 personnes, l’équipe dédiée à l’environnement de travail chez Manutan est rattachée à la DRH Groupe — une chance, selon Nathalie Cara : “car cela facilite l’intégration de la dimension humaine à nos projets”.
Depuis toujours, le collaborateur est au cœur des décisions quotidiennes de l’équipe, bien avant que le Covid ne vienne redéfinir les contours du métier de DET (Direction de l’Environnement de Travail).
“Avec le Covid, on est passé des services généraux à l’environnement de travail.” Nathalie Cara
Elle a été l’une des pionnières de cette évolution de la fonction, en intégrant dès 2017 une brigade dédiée aux services aux collaborateurs. Ce service s’apparente aujourd’hui à ce que l’on appelle l’Hospitality Management — un métier émergent depuis la crise sanitaire. Chez Manutan, cette équipe prend en charge l’accueil, les déplacements professionnels, la conciergerie ainsi que les événements internes. Sa responsable est également membre du CSE, un atout selon la directrice de l’environnement de travail : le climat social est bon et la collaboratrice sait faire la part des choses entre ses responsabilités managériales et son rôle de représentante du personnel.
Grâce à la diversité de ses missions, Nathalie Cara collabore quotidiennement avec l’ensemble des managers et collaborateurs — notamment à travers l’organisation des événements internes, ce qui lui permet de rester constamment au contact des équipes.
Pour rester à l’écoute des collaborateurs — qu’elle appelle ses “clients internes” — la directrice s’appuie sur un système de ticketing, conçu pour faire remonter les problèmes du quotidien. Les demandes sont organisées par thématique, puis réparties entre les membres de son équipe selon leur périmètre d’intervention.
Tous les deux ans, elle complète ce dispositif par une enquête globale sur l’environnement de travail, destinée à prendre le pouls des équipes. Diffusée via un formulaire Microsoft, elle est envoyée à l’ensemble des employés, qui y répondent de manière anonyme. L’édition de l’an dernier, par exemple, a mis en lumière une insatisfaction concernant le prix et la qualité du café. La direction y a répondu concrètement : renouvellement des machines et mise en place d’une politique de deux cafés offerts par jour et par collaborateur.
Bien entendu, ces enquêtes n’ont d’impact que si les problèmes identifiés sont suivis d’actions — ou, le cas échéant, d’une explication transparente lorsqu’une demande ne peut être satisfaite.
Au-delà de ces dispositifs formels, l’écoute se construit au quotidien, dans les échanges de terrain. L’équipe de l’environnement de travail est présente en continu sur site, au contact direct des collaborateurs.
“C’est notre job au quotidien, on doit être à l’écoute de nos clients internes. Au-delà du ticketing, on doit être visible sur site, pour que les collaborateurs nous repèrent et sachent que s’ils ont un souci ils peuvent s’adresser à nous.” Nathalie Cara
Selon elle, près de 40 % des problèmes liés à l’environnement de travail sont identifiés grâce à ces interactions informelles.
Dès le projet de réaménagement du site en 2016, Nathalie Cara avait imaginé des espaces et des services pensés pour offrir une expérience exceptionnelle aux collaborateurs. Le centre sportif, notamment, a été l’un des piliers du projet : 1 000 m² d’installations proposant une large gamme d’activités encadrées par des coachs professionnels — football, squash, zumba, escalade, musculation, tir à l’arc, badminton, fitness, pilates, yoga, tennis de table… Le tout pour une modeste cotisation de 50 € par an. Un dispositif conçu à la fois pour favoriser le bien-être des collaborateurs, promouvoir les valeurs du sport et renforcer la cohésion d’équipe, grâce aux nombreux tournois organisés chaque année.
L’offre de services s’étend également à la conciergerie, aux différents ateliers proposés (théâtre, médiation, etc.), ainsi qu’au restaurant d’entreprise, entièrement internalisé et piloté par les équipes de l’environnement de travail. Ce dernier propose deux formules : une offre classique — entrée, plat, dessert pour 4 €, avec des produits frais, de saison et issus de l’agriculture locale — et une offre bistronomique, dans un espace chaleureux et convivial, à un tarif plus élevé mais toujours accessible.
Cette panoplie de services a été pensée dès le début comme partie intégrante de la stratégie de l’entreprise, pour fidéliser les talents et renforcer l’expérience collaborateur. Loin d’imaginer que quelques années plus tard, l’avènement du télétravail donnerait une autre dimension à ces espaces, désormais cruciaux pour faire revenir les employés au bureau. Avec une politique de 8 jours de présence obligatoire par mois, Nathalie Cara confie que la qualité de vie sur site constitue un atout majeur pour inciter les collaborateurs à venir davantage !
Évidemment, offrir une telle palette de services s’accompagne de son lot de problèmes à gérer, notamment avec l’essor du travail hybride. Le restaurant, par exemple, nécessite une grande agilité, car il est difficile d’anticiper le nombre de couverts à préparer, l’entreprise ne disposant pas d’outil pour suivre la fréquentation des bureaux.
Le centre sportif requiert lui aussi une adaptation continue. Peu fréquenté le vendredi, Manutan a choisi de le valoriser autrement pour éviter qu’il reste inutilisé. Il est désormais mis à disposition gratuitement le matin à une association qui promeut le handicap par le sport, et l’après-midi aux pompiers du Val-d’Oise pour leurs entraînements.
“Dans ce métier il ne faut jamais s’endormir sur ses lauriers, car il est encore en pleine mutation.” Nathalie Cara
Pour Manutan, le passage au flex office ne répondait pas à une contrainte d’espace : les locaux appartenant à l’entreprise, il n’était pas question réduire les mètres carrés.
Ce choix est né d’un constat évident : après le Covid, les collaborateurs ne reviendraient plus au bureau tous les jours, et le poste de travail individuel ne faisait plus sens. La direction y a vu une formidable opportunité de réaménager les espaces pour offrir une meilleure expérience collaborateur.
Lors de l’annonce du passage au bureau partagé, Nathalie Cara confie avoir dû faire face à une vague de protestations internes. Elle explique être parvenue à convaincre les collaborateurs “en donnant du sens au projet”. Elle a organisé des groupes de travail avec les managers, leur expliquant que le rapport au bureau avait changé avec le développement du télétravail : on ne venait plus au bureau simplement pour travailler, mais pour échanger, collaborer. Par conséquent, les traditionnelles lignes de bureaux n’étaient plus adaptées aux nouveaux usages — il fallait créer des espaces alternatifs, alignés avec le modèle hybride.
Par ailleurs, le taux de flex choisi par Manutan reste volontairement conservateur : 0,8 poste par collaborateur. Ce ratio correspond au taux de présence moyen observé en l’absence de politique de télétravail, en prenant en compte les congés, absences et déplacements.
Nathalie a pu faire ce choix car elle n’avait pas de contrainte d’espace et voulait éviter le risque qu’un collaborateur se retrouve sur site sans poste de travail. Cette décision a permis de rassurer les équipes, dans la mesure où l’entreprise n’avait pas prévu de dispositif de réservation de poste de travail.
Les étapes du projet d’aménagement :
Déjà engagé dans un projet de réaménagement des bureaux avant le passage au flex-office, Manutan a choisi un déploiement progressif, au fil des travaux déjà planifiés. Chaque phase a suivi une méthode en trois temps :
Dans cette nouvelle configuration, chaque équipe dispose d’un “quartier”, permettant aux managers de retrouver facilement leurs collaborateurs. De plus, tous les postes sont équipés de manière identique pour éviter toute frustration liée au changement de bureau.
Les espaces libérés ont permis l’insertion de cabines de confidentialité, de casiers personnels, mais aussi d’espaces dédiés au travail collaboratif !
Pour Manutan, le passage au flex office est un véritable succès, car il a permis d’améliorer l’expérience collaborateur :
Si l’introduction du flex office a représenté un véritable bouleversement dans les habitudes, le modèle est aujourd’hui bien ancré : il n’est “pas question de faire marche arrière”.
Une fois terminé, le projet d’aménagement est loin d’être figé. Nathalie Cara confie avoir dû réajuster certains espaces, initialement mal positionnés par rapport aux besoins d’interactions des équipes.
Par ailleurs, au moment de l’interview pour la réalisation de cet article, elle prévoyait d’organiser des entretiens avec les collaborateurs qui utilisent le plus les salles de réunion, afin de mieux comprendre leurs besoins pour les adapter selon les nouveaux usages.
“On fait du test and learn en permanence, on travaille en amélioration continue.” Nathalie Cara
En plaçant l’humain au cœur des décisions liées à l’environnement de travail, Manutan a conçu un site dédié au bien‑être des collaborateurs — un atout qui lui a donné une longueur d’avance lorsque l’ère hybride a bousculé les usages du bureau.
Le passage au flex‑office s’est imposé comme une évidence après la crise du Covid‑19 : il fallait repenser les espaces pour qu’ils répondent aux nouveaux besoins d’échange et de collaboration, et ainsi offrir une expérience collaborateur optimale. Nathalie Cara a mené le projet en veillant à lui donner du sens et à impliquer les collaborateurs, ce qui a permis une forte adhésion de l’ensemble des équipes.